Cette année, la fondation Retina soutient le projet du Dr Isabelle Perrault, de l’institut Imagine à Paris. Son projet s’articule sur une maladie cécitante qui touchent les jeunes enfants : L’Amaurose Congénitale de Leber.
Qu’est-ce que l’amaurose congénital de Leber ?
L’Amaurose Congénitale de Leber (ACL) désigne un groupe de dystrophie rétinienne congénitale précoce et sévère, survenant dans les premiers mois de vie et entrainant une malvoyance profonde. Elle représente 20 % des cécités de l’enfance. Les personnes atteintes d’amaurose congénitale de Leber ont une vision très réduite à la naissance. Dans les premiers mois de la vie d’un nourrisson, les parents remarquent généralement un manque de réactivité visuelle et des mouvements oculaires inhabituels, appelés nystagmus. Les examens des fonds d’œil des nourrissons atteints d’ACL révèlent des rétines d’apparence normale. Cependant, les tests d’électrorétinographie (ERG), qui mesurent la fonction visuelle, détectent peu ou pas d’activité dans la rétine. Dans certains cas, l’ACL est associée à des complications du système nerveux central telles que le retard de développement, l’épilepsie et la déficience motrice, nécessitant une prise en charge particulière.
Rencontre avec le
Dr Isabelle Perrault,
Institut Imagine, Paris.
Quel est votre projet ?
Notre projet vise à pallier ce manque de connaissances pour améliorer la prise en charge des patients et de leurs familles, avec l’amélioration des outils diagnostics et pronostics et l’identification de cibles thérapeutiques. L’intégration du Laboratoire dans l’Institut des maladies génétiques, Imagine, et l’Hôpital Necker qui rassemblent des laboratoires complémentaires et des centres nationaux de référence est un atout pour la réussite de cette entreprise.
Pourquoi vous vous intéressez à l’amaurose congénitale de Leber ? et quelle est votre approche ?
L’amaurose congénitale de Leber (ACL), et les dégénérescences de la rétine apparentées, sont la première cause de malvoyance incurable chez l’enfant. Ces maladies, variables sur le plan clinique, génétique et pathologique, peuvent être le signe initial d’anomalies dans d’autres organes. L’identification des gènes responsables et leur lien avec les symptômes ont transformé la prise en charge de ces maladies. Cependant, pour 14% des familles, nous ne connaissons pas encore la cause moléculaire de la maladie, et un travail est mené pour la rechercher. On parle alors de décryptage génétique de la maladie. De nouveaux gènes sont à découvrir comme le démontre l’identification récente de mutations dans l’un d’entre-eux, à l’origine d’ACL associée à des troubles du comportement. Il s’agit aujourd’hui de poursuivre ces travaux pour tenter de comprendre les différents rôles de ce gène, et l’impact qu’il peut avoir sur la maladie.
Afin de comprendre le rôle du gène dans les atteintes de l’œil et du cerveau des patients, une souris qui porte le « gène malade » a été créée, nous donnant ainsi accès aux tissus cibles associés. Les études réalisées chez la souris portant le « gène malade » ont permis de mettre en évidence des anomalies de la fonction visuelle et des troubles du comportement ainsi que de la fertilité, avec des souris mâles totalement stériles. Ce modèle de souris constitue un très bon modèle d’étude puisqu’il mime les atteintes cliniques des patients. Les analyses vont se poursuivre sur ce modèle murin afin de comprendre l’impact des mutations sur les différents organes et d’identifier les partenaires fonctionnels de ce gène pour établir son rôle physiologique.
Où en est-on sur les traitements ?
Les initiatives d’essais cliniques sur ACL ont permis de mettre au point une thérapie génique sur l’ACL associée au gène RPE65. Cette thérapie est actuellement disponible en France depuis avril 2019 sous le nom du Luxturna®. Cette thérapie est réservée pour les patients « possédant suffisamment de cellules ». En cas de perte cellulaire avancée, l’optogénétique et la thérapie cellulaire sont des thérapies en cours d’étude qui peuvent être une solution car elles sont indépendantes du gène causal. Pour les autres gènes (21 en total) mis en cause dans ACL, les laboratoires de recherche se concentrent en priorité sur le diagnostic et le génotypage afin de proposer des thérapies innovantes pour empêcher la dégénérescence rétinienne.